CANADA | L'Ombudsman de l'Ontario préconise un changement législatif et une refonte de la « moribonde » commission de la location immobilière

Des dizaines de milliers d’Ontariennes et d’Ontariens ont été privé(e)s d’un accès rapide et équitable à la justice et ont subi des préjudices en raison de « terribles retards » à la Commission de la location immobilière. C’est ce que révèle l’Ombudsman Paul Dubé dans son plus récent rapport d’enquête, paru le 4 mai 2023.

Les graves arriérés, les pénuries de personnel et la technologie obsolète qui minaient la Commission depuis des années ont explosé durant « la tempête parfaite » de la pandémie de COVID-19. C’est ce qu’a déclaré l’Ombudsman dans son rapport, intitulé Retard de justice administrative, Déni d’équité. En raison de pressions supplémentaires dues aux confinements, au travail à distance, aux audiences virtuelles et à la suspension des ordonnances d’expulsion, les opérations de la Commission ont été gravement perturbées, comme l’a constaté l’Ombudsman.

« En tant que tribunal administratif, la Commission échoue fondamentalement dans son rôle qui est d’apporter rapidement justice aux locateur(rice)s et locataires de propriétés résidentielles qui cherchent à régler des différends. Ce faisant, elle prive de justice une partie importante de la population ontarienne », dit l’Ombudsman dans le rapport.

Alors qu’il ne fallait auparavant que quelques jours à la Commission pour programmer les audiences, l’attente est désormais en moyenne de sept à huit mois – et la programmation de certaines requêtes de locataires peut prendre jusqu’à deux ans, précise-t-il. Les retards ont également affecté pratiquement toutes les étapes du processus de la Commission. Même après une décision, de nombreuses personnes ont dû attendre des mois pour que l'ordonnance de l'arbitre soit émise. Certains cas ont été encore retardés parce que les membres de la Commission ont pris leur retraite.

« Au cours des dernières années, la Commission s’est montrée mal préparée à réduire ses arriérés considérables de requêtes. Plus important encore, ces requêtes représentent des dizaines de milliers d’Ontarien(ne)s qui souffrent de difficultés causées par l’incapacité de la Commission à fournir des services en temps opportun. »

L’Ombudsman a reçu plus de 4 000 plaintes de personnes de part et d’autre de la relation propriétaires-locataires. Beaucoup de ces personnes ont décrit les préjudices financiers et psychologiques subis, alors qu’elles se trouvaient « prises au piège dans la file d’attente », patientant pour que leurs requêtes soient entendues.

« Des locataires sont restés dans l’attente tandis qu’ils(elles) enduraient des harcèlements, vivaient dans des conditions dangereuses et subissaient des tentatives inappropriées d’expulsion de leur logement. Des petit(e)s locateur(rice)s, dont certain(e)s louaient des espaces dans leur propre maison, essayaient de faire face aux abus ou à la conduite criminelle de leurs locataires, qui les exposaient à la ruine financière et à de graves problèmes de santé », écrit-il. « De toute évidence, les retards prolongés dans le traitement de leurs requêtes leur causaient, ainsi qu’à d’autres, des difficultés considérables. »

L’enquête, menée par l’Équipe d’intervention spéciale de l’Ombudsman, a examiné les problèmes systémiques existants de la Commission, ainsi que sur ses difficultés à relever les défis liés à la COVID-19, incluant un passage aux audiences en ligne et un portail défectueux pour les requêtes. Tout au long du processus, le personnel de l’Ombudsman a aidé de nombreux locataires et propriétaires à résoudre leurs problèmes individuels.

Parmi les « multiples inefficacités » identifiées par l’enquête, on peut citer :

  • Une pénurie d’arbitres (membres) qualifié(e)s, aggravée par un processus de nomination et de formation long et fastidieux
  • Un processus complexe de requêtes qui oblige parfois les requérant(e)s à recommencer en raison d’erreurs
  • Des systèmes obsolètes qui ne sont pas équipés pour trier ou accélérer les cas urgents, suivre les ordonnances et les charges de travail des membres, ou identifier les membres dont le mandat arrive à expiration
  • Une manque d’arbitres bilingues disponibles, et des formulaires de requête qui indiquent uniquement si les requérant(e)s ont besoin de services de français, sans faire de même pour les parties intimées

La plupart des 61 recommandations de l’Ombudsman s’adressent à la Commission et/ou à Tribunaux décisionnels Ontario, et présentent des propositions de réformes détaillées. Trois d’entre elles demandent au gouvernement de modifier la loi afin de supprimer les obstacles aux nominations des membres. D’autres demandent au Ministère, à la Commission et à Tribunaux décisionnels Ontario de travailler ensemble pour réduire les arriérés de cas à la Commission.

Tribunaux décisionnels Ontario, agissant au nom de la Commission, a accepté les recommandations, de même que l’a fait le Ministère. Ils se sont engagés à rendre compte à l’Ombudsman des progrès réalisés dans leur mise en œuvre. En outre, le gouvernement a annoncé récemment un investissement de 6,5 millions $ pour embaucher 40 arbitres supplémentaires et cinq membres du personnel en plus à la Commission.

« J’exhorte le gouvernement de l’Ontario à agir rapidement pour accroître la capacité décisionnelle de la Commission et pour financer le supplément de personnel requis afin d’appuyer les nouveaux(elles) membres. Sinon, compte tenu des délais de recrutement et de formation, les effets positifs de cette initiative pourraient être considérablement retardés », dit l’Ombudsman dans le rapport. « Plus cette initiative progressera rapidement, et plus tôt la Commission sera en mesure d’améliorer ses niveaux de services. »

Pour lire le rapport d'enquête entier, veuillez consulter la séction de téléchargement ci-dessous.

 

Source: L'Ombudsman de l'Ontario, Canada

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